Greffe de peau : une nouvelle cible moléculaire pour activer les cellules souches

Une équipe de recherche de l'Université d’Évry Paris-Saclay, du CEA, de l’Inserm, de Paris Diderot et de l’AFM vient de publier une étude dans laquelle elle démontre le rôle central du facteur de transcription KLF4 dans le contrôle de la prolifération des cellules souches de l’épiderme et de leur capacité à régénérer ce tissu. Cette étude ouvre des perspectives pour la médecine régénérative de la peau. Elle est publiée le 21 octobre dans Nature Biomedical Engineering.

L’épiderme humain se renouvelle entièrement tous les mois grâce à la présence de cellules souches dans sa couche la plus profonde, qui donnent naissance à l’ensemble des couches plus superficielles de ce tissu. Le décryptage des gènes assurant le contrôle du caractère souche, ou « stemness », reste à ce jour une énigme imparfaitement résolue, en particulier pour la peau humaine.

Les découvertes d’une équipe de recherche française du CEA, de l’Inserm et de Paris Diderot, générées en collaboration avec l’AFM et l’Université d’Évry Paris-Saclay, ouvrent des perspectives pour la médecine régénérative cutanée, en particulier pour la bio-ingénierie des greffons de peau destinés à la reconstruction tissulaire. En effet, l’amplification massive en culture de cellules de l’épiderme (appelées kératinocytes) est nécessaire à la production de greffons. Elle est effectuée à partir d’un échantillon de peau issu du patient qui contient des kératinocytes matures et une population minoritaire de cellules souches kératinocytaires. Cette phase d’amplification comporte un risque : elle peut s’accompagner d’une perte quantitative ou d’une altération des cellules souches, conduisant à une perte de potentiel régénératif.

Les résultats de l’étude publiée dans Nature Biomedical Engineering montrent que diminuer l’expression du gène KLF4 pendant la préparation du greffon favorise une amplification rapide de cellules souches fonctionnelles1, sans altérer leur stabilité génomique. Les kératinocytes amplifiés dans ces conditions présentent un potentiel régénératif à long terme accru dans des modèles de reconstruction épidermique in vitro et de greffes in vivo2. KLF4 constitue donc une nouvelle cible moléculaire pour préserver la fonctionnalité des cellules souches et faire progresser la bio-ingénierie des greffons cutanés. Ces résultats constituent ainsi une démonstration de principe, qui nécessite des développements complémentaires pour envisager des applications cliniques. Parmi celles-ci, citons le soin des grands brûlés, des ulcères chroniques et la reconstruction mammaire.

Ces travaux ont été étendus à d’autres types cellulaires d’intérêt pour la thérapie cellulaire cutanée. À l’avenir, les kératinocytes produits à partir de cellules pluripotentes pourraient constituer une alternative aux cellules souches adultes dans certaines applications de bio-ingénierie de tissus reconstruits. Une des difficultés rencontrées dans cette voie est le fait que les kératinocytes obtenus ne possèdent pas toutes les fonctionnalités des cellules souches adultes.

Ils sont notamment déficients au niveau de leur potentiel de prolifération. L’étude a permis de montrer que la manipulation de l’expression de KLF4 est également adaptée à ces cellules, car la diminution de son expression dans les kératinocytes dérivés d’ESC améliore leur capacité de prolifération ainsi que leur capacité à reconstruire de la peau.

Affiliations des auteurs

1. Laboratoire de Génomique et Radiobiologie de la Kératinopoïèse (LGRK), CEA/DRF/IBFJ/IRCM, 91000 Évry, France; Fontenay-aux-Roses; Université Paris-Diderot, Paris 7; Université Paris-Saclay, Paris 11, France.

2. Université d’Évry Paris-Saclay, INSERM U861, Institut des cellules Souches pour le Traitement et l'Étude des Maladies Monogéniques (I-Stem), 91100 Corbeil Essonne, France.

3. Centre d'Étude des Cellules Souches (CECS), Institut des cellules Souches pour le Traitement et l'Etude des Maladies Monogéniques (I Stem), 91100 Corbeil Essonne, France.

4. Centre National de Recherche en Génomique Humaine (CNRGH), CEA/DRF/IBFJ, 91000 Évry, France.

5. Laboratoire de Recherche sur la Réparation et la Transcription dans les Cellules Souches (LRTS), CEA/DRF/IBFJ/IRCM, 92265 Fontenay-aux-Roses, France; INSERM U1074, Fontenay-aux-Roses; Université Paris-Diderot, Paris 7; Université Paris-Saclay, Paris 11, France.

Retour à la liste d'actualités