Une plateforme microfluidique pour décrypter le dialogue entre membranes et cytosquelette

Publié le :
15
oct. 2025
Dans une étude publiée dans Small Science, les chercheurs du laboratoire LAMBE (Université Evry Paris-Saclay / CNRS) ont développé une plateforme microfluidique permettant d’explorer comment le cytosquelette d’actinemodule la forme des membranes biologiques.
Les auteurs ont mis au point un dispositif capable d’immobiliser une population de vésicules géantes unilamellaires (GUVs), puis d’observer en temps réel l’interaction entre ces membranes lipidiques modèles et des réseaux d’actine reconstitués. Ce système permet de modifier séquentiellement la composition protéique de l’essai et d’étudier la dynamique de déformation membranaire.
Grâce à cette approche, ils montrent que les réseaux branchés d’actine empêchent la coalescence de microdomaines lipidiques, stabilisant ainsi la structure membranaire. Réciproquement, la densité de domaines lipidiques dans la membrane influence la structure du réseau d’actine. Cette méthode microfluidique combinée à l'observation de populations de GUVs ouvre de nouvelles perspectives pour étudier comment le cytosquelette change la forme des membranes biologiques in vitro et pourra être adaptée à d’autre processus de remodelage membranaires.
Contexte & objectif
Les cellules modifient activement leur forme — pour migrer, se diviser, former des protrusions, etc. — via leur cortex actomyosine, une structure faite d’actine (et de myosine) interagissant avec la membrane lipidique. Le remodelage de la membrane (des plis, des domaines lipidiques, des invaginations, etc.) est intimement lié à l’architecture de l’actine.
Cependant, l’étude in vitro de ces processus est difficile : on veut pouvoir reconstruire un système minimal qui combine membrane avec un réseau d’actine et observer leurs interactions dans un contexte contrôlé. C’est dans cette idée que les auteurs présentent une plateforme microfluidique pour étudier comment les réseaux d’actine ramifiés (branchés) stabilisent les microdomaines lipidiques au sein de membranes.
Le but : montrer expérimentalement que les réseaux d’actine ramifiés jouent un rôle de stabilisation (empêchant la fusion ou la coalescence) des microdomaines lipidiques, ce qui a des implications pour la biomécanique cellulaire (organisation membranaire, contrôle de surface, etc.).
Implications : une base plus claire de modélisation des interactions
Les auteurs interprètent que les réseaux d’actine ramifiés peuvent servir comme un “filet stabilisateur” au niveau de la membrane, prévenant l’agrégation excessive ou la fusion de microdomaines lipidiques. Ceci pourrait jouer un rôle dans la façon dont les cellules contrôlent la distribution des lipides, la signalisation membranaire (en limitant la coalescence de domaines qui portent des récepteurs ou protéines), ou la plasticité membranaire lors de changements de forme.
Cette plateforme microfluidique “reconstituée” permet de séparer les contributions mécaniques de l’actine des autres composants cellulaires, ce qui donne une base plus claire pour modéliser les interactions membrane–cytosquelette.
L’article suggère que ces résultats pourraient inspirer de nouveaux modèles théoriques de la dynamique membranaire en présence de cytosquelette, et aider à comprendre des phénomènes cellulaires tels que la stabilisation de nano-domaines lipidiques (lipid rafts), la formation de sites de signalisation spécifique, ou l’organisation sub-membranaire.